La France se présente comme le berceau de la laïcité, un principe fondateur de la République censé garantir la neutralité de l’État face aux convictions religieuses. Pourtant, derrière cette vitrine républicaine se cache un paradoxe inquiétant : l’État français perpétue des discriminations systémiques à l’égard des athées et de l’athéisme. Cette réalité reste largement occultée dans les débats publics, alors même que plus de 50 % des Français se déclarent sans religion.
L’une des formes les plus visibles de discrimination réside dans les politiques publiques qui continuent de privilégier les institutions religieuses. Le financement public de bâtiments cultuels, les subventions accordées aux écoles privées confessionnelles, ainsi que les exonérations fiscales pour les organisations religieuses illustrent cette inégalité structurelle. Pendant ce temps, les convictions athées, bien qu’aussi légitimes, ne bénéficient d’aucune reconnaissance ni d’aucun soutien institutionnel.
En outre, les textes de loi, comme la LOI n° 2008-496 du 27 mai 2008 sur la lutte contre les discriminations, omettent explicitement de protéger les convictions athées, créant ainsi un vide juridique qui permet des discriminations implicites, voire explicites, sans recours effectif pour les victimes.
Sur le plan symbolique, la présence récurrente de références religieuses dans les discours officiels, les cérémonies publiques et même au sein des institutions étatiques renforce la marginalisation des athées. L’absence de représentation des convictions athées lors d’événements nationaux est un aveu d’État perpétuant l’idée que ‘la religion est le socle des valeurs républicaines, reléguant ainsi l’athéisme au rang d’absence de valeur ou de croyance. Ces discriminations ont des conséquences concrètes, à commencer par le fait qu’elles limitent la visibilité des athées dans la sphère publique, entravent leur participation égale aux débats sociétaux, tout en perpétuant des stéréotypes négatifs. De plus, le financement des religions par des fonds publics, auxquels contribuent tous les citoyens, constitue une inégalité fiscale à l’égard des athées qui se retrouvent, contre leur volonté, à financer des croyances qu’ils ne partagent pas.
C’est pour cela qu’il est essentiel que la République française, ses institutions, mais aussi ses personnalités politiques, reconnaissent l’athéisme comme une conviction à part entière, digne du même respect et de la même protection que celles concernant les cultes religieux. L’État doit cesser de traiter l’athéisme comme une simple absence de foi et le considérer pour ce qu’il est, c’est-à-dire une conception du monde, capable d’appréhender l’existence sans recourir au surnaturel. Ce n’est qu’ainsi que la France pourra prétendre incarner véritablement les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité.
G. Ragnaud