Viktor Orban, Premier ministre hongrois, s’est progressivement transformé en champion d’un christianisme nationaliste, qu’il place au cœur de son projet politique. Depuis son retour au pouvoir en 2010, il affirme que la Hongrie doit être une « démocratie chrétienne illibérale », par opposition aux démocraties libérales occidentales qu’il juge décadentes.
Depuis 2010, Orbán instrumentalise la religion chrétienne comme socle idéologique de son autoritarisme, prétendant défendre une « civilisation chrétienne » face à l’immigration, à l’Union européenne et à ce qu’il appelle le « libéralisme progressiste ». En réalité, cette stratégie sert à restreindre les libertés individuelles, à marginaliser les minorités, et à réduire au silence toute pensée critique, notamment laïque ou athée.
Son gouvernement finance massivement les Églises, leur confie des écoles publiques, modifie la Constitution pour inscrire Dieu et la foi chrétienne comme piliers de l’identité nationale… C’est toute la structure de l’État qui devient perméable à l’idéologie religieuse, dans une confusion volontaire entre foi, tradition et autorité.
Mais Viktor Orbán n’est pas un cas isolé. Son modèle inspire déjà d’autres leaders populistes en Europe, qui rêvent eux aussi d’une fusion entre religion et nation, entre dogme et loi. Ce glissement autoritaire, porté par une rhétorique religieuse, menace directement les droits fondamentaux, notamment ceux des femmes, des personnes LGBTQ+, des minorités, mais aussi… des athées, dont les convictions sont exclues du débat public.
Face à cette dérive, le silence de nombreuses démocraties européennes est assourdissant, comme si la religion, dès lors qu’elle s’affiche conservatrice, devenait un passe-droit pour piétiner les principes républicains.
Le cas de Viktor Orbán offre un exemple éclairant de la manière dont le religieux peut s’articuler avec le pouvoir politique dans une démocratie contemporaine. En Hongrie, le christianisme conservateur n’est pas seulement une conviction personnelle, mais un élément structurel du projet gouvernemental. Orbán a redéfini les règles du jeu pour intégrer l’Église dans la gouvernance du pays, aussi bien symboliquement (constitution imprégnée de références chrétiennes) que concrètement (financements, gestion d’écoles, influence sur les lois). Son concept de « démocratie chrétienne illibérale » se traduit par une volonté de rompre avec le pluralisme libéral, en revendiquant une identité chrétienne majoritaire comme socle de l’État.
Si le ton de son discours se veut protecteur des valeurs spirituelles, ses détracteurs y voient une instrumentalisation de la religion à des fins de contrôle social et politique. Quoi qu’il en soit, la Hongrie d’Orbán illustre une tendance où la religion, loin de s’effacer de la sphère publique, est mise au service d’un projet nationaliste et conservateur.